mardi 14 Janvier 2025
L'interdiction des messages promotionnels pour le jeu sur les maillots des équipes de sport vient d'entrer en vigueur le 1er janvier. Il s'agit de la première étape menant vers la disparition complète du sponsoring prévue par la nouvelle loi sur les jeux de hasard. Face à ce bouleversement de leur méthode préférée de communication, les opérateurs ont réussi à trouver une parade ingénieuse qui fait grincer des dents. Ils ont en effet décidé de créer des marques dérivées qui font référence à leur identité de casinotiers ou de bookmakers, mais qui exercent sur des secteurs complètement différents comme la presse par exemple.
La Belgique veut lutter encore plus efficacement contre la dépendance au jeu. Dans cette optique, le gouvernement a fait passer un texte visant à interdire progressivement le sponsoring dans le sport. Les porteurs du projet affirment qu'une publicité mieux contrôlée va permettre de réduire de manière significative le nombre de profils à problème et les comportements à risque de manière générale. L'initiative a évidemment fait jaser du côté des opérateurs qui vont perdre un de leurs principaux leviers d'acquisition, mais également auprès des clubs de sport. Ces derniers dépendent en effet des revenus générés par les contrats de sponsoring. En Belgique, 80 % des clubs de Jupiler Pro League ont comme partenaire principale un opérateur de jeux de hasard. L'interdiction pourrait donc signer leur arrêt de mort ou les handicaper sérieusement pour leur développement notamment sur le marché des transferts.
Dans une envolée lyrique qui a été reprise dans la presse, les défenseurs du texte ont abordé la question en faisant un parallèle avec la Formule 1. Lorsque les vendeurs de tabac se sont retirés en raison de l'interdiction de la publicité, le secteur a réussi à trouver d'autres partenaires pour maintenir son activité. Pour eux, la place laissée par les opérateurs de jeux sera forcément comblée par d'autres sociétés issues d'autres zones d'activités. Le parallèle semble toutefois s'être retourné contre les porteurs du texte. Les casinotiers et les bookmakers belges viennent en effet de trouver une parade ingénieuse à l'interdiction. Et celle-ci leur a été inspirée directement par Marlboro, le géant du tabac qui a notamment été visé par la restriction de la publicité dans la Formule 1.
La loi interdit aux opérateurs de jeux de mettre leur nom à l'avant des maillots des équipes de sport. Pour contrer cette interdiction, les sociétés de jeux ont décidé de changer d'appellation. Celle-ci garde le cœur de la marque, mais ajoute une sorte d'extension évoquant une nouvelle activité. Circus par exemple est désormais Circus Daily, un site d'information. Unibet, de son coté, développe U-Experts, une application mobile d'actualités et de conseils tandis que Ladbrokes a développé Ladbrokes Live, une plateforme parlant de sport ou encore Golden Palace qui lance son site d'actualités sportives Golden Palace News. L'initiative est ingénieuse puisque les politiques à l'origine du texte ne peuvent pas la sanctionner. Ces derniers ont en effet besoin d'une intervention du Conseil d'État. En attendant, le débat est donc ouvert : changer de nom règle-t-il le problème ?
Pour Bruno Liesse, dirigeait de Polaris, la division Études de l'agence média Space : « Quand une marque change de nom, elle perd toujours des points dans l'esprit du consommateur ». L'initiative des opérateurs est donc une prise de risque puisque les joueurs pourraient ne pas faire le lien entre leur nouvelle identité et leur activité de jeux. De ce point de vue, elle est en accord avec les objectifs de l'interdiction qui vise à détourner l'attention des jeux. Bruno Liesse avertit toutefois les politiques. D'après lui, le sponsoring n'est qu'un moyen publicitaire passif. Son interdiction ne va donc pas impacter le risque d'addiction au jeu. Il préconise d'ailleurs une autre approche à savoir un retour aux sources avec du mécénat. Il propose d'obliger par la loi les opérateurs à soutenir des œuvres, des projets culturels ou des initiatives sportives comme l'a fait Peppermill avec Kinderkankerfonds sponsor du SK Beveren.