mercredi 22 Mars 2023
L'affaire Maestro revient sur le devant de la scène publique. Après plusieurs années de flottement et d'attente, la justice se met finalement en marche. Sept joueurs professionnels belges ont été identifiés et seront présents sur le banc des prévenus au tribunal correctionnel d'Audenarde. Selon le rapport de police, ils ont participé à un réseau criminel qui truquait des maths de tennis. Celui-ci serait dirigé par Grigor Sargsyan, un Saint-Gillois de 33 ans surnommé Maestro. Il aurait distribué plus de 560 000 euros de pots-de-vin à des joueurs de tennis belge, dont l'ancien numéro trois et 124e mondial.
Basée en Arménie, l'organisation Maestro aurait opéré à travers plusieurs pays d'Europe entre 2016 et 2018. Ses activités ont été repérées une première fois en 2015 par un officier de liaison de la police de la Commission des jeux de hasard. Il aura toutefois fallu attendre une seconde initiative pour qu'un dossier soit ouvert. Celui-ci a ensuite engendré l'ouverture de plusieurs enquêtes à travers l'Europe notamment en France, Slovaquie, Allemagne et Bulgarie. Les États-Unis se sont également penchés sur cette organisation.
À noter que depuis la révélation de cette affaire au grand jour, les matchs truqués ont connu une baisse de plus de 44 % dans le monde du tennis. L'opérateur Bingoal a même déclaré qu'il n'y avait plus de problème visible de trucage. Une position partagée par le coordinateur de la plateforme nationale contre la fraude sportive, Guy Reinenbergh. Il a ajouté que la justice belge continuait à travailler de près avec la Fédération internationale de tennis.
L'affaire porte sur 181 joueurs professionnels de tennis. Ils sont tous suspectés d'avoir participé à des matchs truqués. En Belgique, ce sont 376 rencontres qui ont été épinglées comme frauduleuse. À noter que les matchs impliquaient des joueurs classés de la 150e à la 1 000e place mondiale. Selon le parquet fédéral belge, plus de 560 000 euros ont été payés en pots-de-vin par l'organisation à des tennismen belge. À l'échelle mondiale, cependant, les chiffres sont évalués à plusieurs millions. Entre juin 2016 et mars 2018, 8,2 millions d'euros auraient transité sur le compte du directeur financier de l'organisation, Andranik M.
En mai 2018, la justice belge mène plusieurs perquisitions à travers le pays. Cela va lui permettre de mettre la main sur 4 GSM utilisés par Maestro pour organiser les matchs truqués en Belgique. Les informations contenues dans ces appareils permettront d'identifier le mode opératoire de l'organisation. Celui-ci commençait toujours par un repérage de potentiels partenaires dans des évènements nationaux peu médiatisés comme les tournois de Coxyde ou Eupen. Ces tournois regroupent en effet des joueurs qui sont talentueux, mais pas assez pour vivre de leur passion. Ils représentent les victimes idéales pour l'organisation puisqu'ils doivent faire face à plusieurs dépenses pour participer à des tournois ou juste maintenir leur carrière.
Une fois les tennismen identifiés, Sargsyan, le chef de la branche belge, prenait contact avec eux et fixait un rendez-vous au Bar du Matin à Forest. Sur place, il leur donnait une puce étrangère afin de sécuriser leurs échanges. Juste avant leur match, les joueurs recevaient directement leurs instructions de Sargsyan. Celui-ci transmettait ensuite les paris à jouer à l'ensemble de ses partenaires via divers réseaux comme Télégram ou Whatsapp. Une fois le match terminé, Sargsyan reversait leurs parts aux joueurs via un virement ou en déposant directement l'argent dans leur boite aux lettres.
Les informations collectées par la police via les GSM récupérés ont permis d'identifier 7 joueurs belges. Ils sont suspectés d'avoir accepté des pots-de-vin pour truquer leur match. Des captures d'écran sur Télégram montrent d'ailleurs que certains ont accepté de perdre 6-0 lors de tournois nationaux. Devant le tribunal correctionnel d'Audenarde, ils ont tous nié les faits. Me Walter Van Steenbrugge, qui défend trois d'entre eux, a d'ailleurs déclaré : « Mes clients plaident non-coupables. Il y a un net dépassement du délai raisonnable et ce n'est pas la faute de mes clients ».