lundi 22 Mai 2023
Le ministre la Justice veut interdire la publicité pour les jeux d'argent pour enrayer le phénomène d'addiction. Pour cela, il a élaboré un texte qui devrait entrer en vigueur le 1er juillet. Les opérateurs, de leur côté, continuent d'exprimer leur opposition à ce projet. Selon eux, il ne fera en effet qu'accentuer les risques en favorisant les sites étrangers.
Pour soutenir son projet, le ministre de la Justice se base sur un rapport du Centre d'expertise flamand pour l'alcool et les autres drogues (VAD). Selon ce document, 100.000 joueurs actifs présentent un trouble du jeu, dont un tiers souffrirait d'une addiction sévère. Les profils seraient d'ailleurs de plus en plus jeunes en raison de l'expansion du secteur digital. Selon la Commission des jeux de hasard, 137.000 joueurs étaient actifs chaque jour sur les sites agréés en 2021 contre 63.000 en 2018. Ils seraient majoritairement jeunes puisque 8 % avaient entre 18 et 20 ans, 34 % entre 21 et 29 ans et 27 % entre 30 et 39 ans. Pour enrayer ce phénomène, le ministre de la Justice veut interdire la publicité, d'abord progressivement puis totalement. Avec son texte, seules les personnes qui veulent jouer et sont en recherche active d'informations peuvent être confrontées à des pubs pour le jeu. Il prévoit également l'interdiction de plusieurs supports et formats, dont la télévision, la radio, les réseaux sociaux, les magazines, les affichages et les sites web.
Si le projet du ministre de la Justice aboutit, la publicité pour les jeux se limitera à des spots de 5 secondes. Ceux-ci seront diffusés sur les sites et les réseaux sociaux des opérateurs ou sur une page web d'un moteur de recherche. La publicité à la télévision quant à elle sera limitée à des spots de 5 secondes durant des tournois sportifs. Le sponsoring est également visé et devrait disparaitre à l'horizon 2025. Le texte a été accueilli froidement par les opérateurs privés, les politiques, les médias et le monde sportif. L'un des reproches les plus communs est qu'il a été fait sans concertation avec le secteur, ni avec le régulateur. Les opérateurs, de leur côté, rappellent qu'il existe déjà un cadre de protection pour les joueurs à savoir le système EPIS.
À noter d'ailleurs que celui-ci ne concerne que les sociétés privées. La Loterie nationale n'est soumise à aucune obligation du genre ce qui est justement l'autre source de tension dans cette affaire. Tout le monde en particulier les opérateurs privés dénonce le manque de cohérence du gouvernement et sa vision biaisée vis-à-vis de la société d'État. La Loterie nationale est en effet de loin le premier annonceur en Belgique. Elle échappe toutefois à l'interdiction de la pub ainsi qu'aux obligations morales imposées au privé. Emmanuel Mewissen, patron de Gaming1, a rappelé que la publicité permet de canaliser les joueurs et de les éloigner du marché illégal. Cet argument est d'ailleurs en parfaite harmonie avec la défense principale de la Loterie nationale elle-même qui indique que « pour orienter les joueurs vers des jeux à faible risque, il faut pouvoir faire de la publicité ».