vendredi 5 Septembre 2025
Les conclusions de l'Avocat général Emiliou (CJUE, affaire C-440/23, 4 septembre 2025) pourraient ouvrir une brèche pour les joueurs belges ayant parié sur des sites étrangers sans licence locale. Entre gains potentiels, obstacles juridiques et risques de déresponsabilisation, le débat est relancé.
L'affaire C-440/23 oppose un cessionnaire de joueur allemand à deux sociétés établies à Malte (Lottoland). La juridiction maltaise a demandé à la Cour de justice de l'UE (CJUE) si elle pouvait écarter la loi allemande interdisant les jeux de hasard en ligne au nom de la libre prestation des services (article 56 TFUE).
Dans ses conclusions, l'Avocat général Nicholas Emiliou estime que :
À l'image des milliers de procédures engagées en Allemagne et en Autriche, un joueur belge pourrait invoquer la nullité du contrat de jeu conclu avec un opérateur étranger non agréé par la Commission des Jeux de Hasard (CJH). Résultat espéré : la restitution des pertes.
La possibilité théorique de récupération pourrait encourager certains joueurs à prendre plus de risques, pensant pouvoir toujours se retourner contre l'opérateur. En pratique, la probabilité d'obtenir un remboursement reste faible, surtout face aux opérateurs étrangers soutenus par des législations protectrices comme celle de Malte.
Pour les autorités belges, cette jurisprudence potentielle est à double tranchant :
Quant aux opérateurs agréés en Belgique, ces conclusions renforcent indirectement leur légitimité : jouer sur des sites non licenciés expose le joueur à un risque juridique bien supérieur, et à une protection quasi inexistante en cas de litige.
La question qui se pose désormais est celle de la responsabilité des joueurs. Si l'on admet que des mises peuvent être récupérées en invoquant la nullité du contrat de jeu, ne risque-t-on pas de créer un effet pervers ? Le joueur ne serait-il plus pleinement responsable de ses choix, pariant sans frein avec l'idée qu'en cas de perte, il pourra invoquer l'illégalité de l'opérateur pour se faire rembourser ?
Entre protection du consommateur et risque de déresponsabilisation, l'arrêt à venir de la CJUE dans l'affaire C-440/23 sera déterminant pour fixer les limites du jeu d'argent transfrontalier en Europe.